A ce jour, la prise de conscience des enjeux et de la nécessité d’aborder le problème du développement durable de manière volontaire est effective. Les actions en faveur du développement durable se multiplient et sont largement médiatisées, parfois abusivement. Mais les résultats des réalisations sont encore loin des objectifs car le problème est mal posé à la base. Nous utilisons des hypothèses tronquées par le biais cognitif fondé sur notre anthropocentrisme. C’est notre référentiel qu’il faut changer comme la révolution copernicienne a réfuté l’héliocentrisme et transformé les méthodes scientifiques et les idées philosophiques de représentation de l’univers.
La démarche scientifique nous a appris que face à une problématique systémique, la solution ne serait pas évidente et qu’elle ne saurait émerger qu’à partir d’innovations de rupture. Revoyons donc les hypothèses. Eloignons nous de la terre, et voyons notre planète bleue y englobant tout ce qu’elle porte. C’est le concept de Gaïa ou du Cosmos chez les Grecs anciens. Nous prendrons comme fil conducteur et illustration, le Congo, pays riche de ses matières premières et de ses forêts équatoriales.
La transformation accélérée de nos sociétés a fait de la responsabilité sociétale un enjeu mondial. Le concept d’économie symbiotique énoncé par Isabelle Delannoy, qui consiste à créer une association durable et intime entre l’Homme et la nature, répond à cet enjeu. Cependant les conditions d’une économie éco-responsable dynamique ne sont pas réunies. Si nous nous appuyons sur ce concept économique, nous sommes convaincus que les vertus de cette économie ne pourront exister que si elle est supportée par la Finance. Aussi nous la complétons du principe de la finance symbiotique que nous définissons à partir de trois propositions qui jetteront les bases d’une nouvelle vision financière et comptable de nos sociétés, propre à dynamiser la préservation de notre planète.

Economiquement, lorsque l’entrepreneur fabrique un objet à partir d’une matière première, il l’a acheté à un fournisseur dont il devient le débiteur. Dans son processus de transformation, il y ajoute du travail qu’il va immobiliser. Le renouvellement de cette immobilisation est financé par de l’amortissement.
Dans le cas d’un pays comme le Congo, source de matières premières, lorsqu’on achète une grume brute ou transformée, on n’a jamais payé la terre qui a fourni la matière première. Cela lui a pris quand même quelques dizaines d’années pour nourrir l’arbre jusqu’à sa maturité, avant de passer dans la scierie. Cela mériterait sans doute salaire. Si on parle de ressource minérale ou d’énergie fossile (pétrole, charbon), c’est jusque quelques centaines de millions d’années qu’il faudrait compter. Nous les consommons après avoir payé notre quote-part dans l’exploitation, l’extraction, le transport de la matière première. Accessoirement nous payons un petit « pretium doloris » au pays propriétaire de la matière ; mais jamais nous ne payons d’amortissement ni le coût de la reconstitution de la matière première. Le premier postulat est donc bien entendu faux. La quantité de matière est finie et son remplacement est tout simplement ignoré. C’est la première erreur dans nos hypothèses, qu’il convient de corriger en introduisant dans la comptabilisation des matières premières un coût de financement de leurs remplacements.
En réponse à la catastrophe écologique qui s’annonce, les Nations Unies ont décrété que l’avenir de notre planète était inscrit dans l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD) du Global Compact. Le résultat des actions poursuivant les ODD est l’Impact Positif (i) qui n’a pas de bénéficiaires clairement identifiés : Il s’agit de l’humanité et de la planète en général ; (ii) qui n’est pas daté : Il s’inscrit dans des durées étalées sur plusieurs générations ; (iii) qui est difficilement quantifiable, souvent immatériel (sauvegarde des espèces, égalité des sexes). On comprend de cette définition les difficultés de mesure puis de valorisation de l’impact positif et de là, que l’absence de valorisation financière de l’Impact+ soit le principal frein à la réalisation des ODD (source Global Compact).
Face à ce constat, la solution n’est pas pour autant la décroissance ou la restriction de notre activité sur cette terre. Nous devons certes exploiter et vivre différemment ; mais avant tout, il importe de passer d’une civilisation fondée sur l’avoir et le matérialisme à une civilisation fondée sur l’être, la quête de sens et la spiritualité. C’est une nouvelle appréhension de nos conditions d’existence qui suppose que nous changions notre vision du monde pour inventer et mettre en place un nouveau modèle où la principale ressource serait désormais l’immatériel. L’absence de valorisation économique de l’immatériel, la gratuité de son immanence ne nie pas son principe, mais dans un monde matérialiste et financiarisé à l’extrême, en font une valeur accessoire, mineure, porteuse d’aucune dynamique. C’est la deuxième erreur qu’il convient de corriger. Nous proposons une inversion des valeurs qui conditionnera la reconnaissance d’une valeur à l’immatériel et le passage dans une économie qui rémunèrerait le travail produisant les actifs immatériels.
Après la valorisation, de nombreuses difficultés ralentissent encore l’émergence d’un marché financier de l’impact+, comme l’accès à des sources de financement, la complexité de la définition de l’impact, la multiplication des labels/certifications verts et durables, le manque de transparence et de vérification des informations et enfin, la gestion des données massives d’un projet. L’enjeu est mondial, le besoin de financement colossal. La poursuite des ODD n’est possible aujourd’hui que par les subventions déversées par les nations aux économies avancées. Nous proposons une alternative en créant la confiance par des innovations dans la finance, la technologie, la durabilité. VENTUREXPERT invente le NFT Certificat d’Impact Positif (CIP), un actif digital non fongible mais négociable qui permet l’émergence du marché du financement des valeurs immatérielles de l’Impact+. Le certificat Vertdeep enregistre la certification des actions de développement durable des écosystèmes forestiers. Il permet aux porteurs de projets de certifier l’impact+ et aux investisseurs de justifier leur label ESG.
Le Congo oeuvre pour le bien de l’humanité en préservant les forêts primaires. La certification Vertdeep, par la preuve des bénéfices réalisés par l’entretien des espaces forestiers (impact+), atteste les bienfaits de la politique durable du Congo. Pour inscrire sa continuité, il est impératif de reconnaître ses actions et d’accompagner les populations qui vivent de la forêt ou dans la forêt.
Aujourd’hui, les subventions accordées au pays, qui ne couvrent que partiellement le besoin de financement, permettent la réalisation par le Congo de projets dont les bénéfices profitent à l’humanité et dépassent largement l’investissement que représente le coût des projets. Le bilan de l’opération est alors largement en faveur du Congo qui, de subventionné, devient créancier de sa contrepartie, du reste du monde. Grâce à la preuve de la valeur de l’impact+ avérée par le Certificat Verdeep, les rapports du Congo envers les bailleurs internationaux (FMI, Banque Mondiale) s’inversent.
Le problème initial vient du fait qu’on a valorisé le pays qu’à travers ses matières premières sans considérer sa contribution nette au bienêtre de l’Humanité. C’est la troisième erreur originelle de nos hypothèses. Cette valeur reste immatérielle et l’économie classique ne sait pas la prendre en compte. Mais, Vertdeep la matérialise (ses preuves dans un NFT) et la valorise. Cette valeur peut alors être comptabilisée dans son PIB et rémunérée.
A ce jour, la prise de conscience des enjeux et de la nécessité d’aborder le problème de manière volontaire est effective. Les actions en faveur du développement durable se multiplient et sont souvent médiatisées, parfois abusivement. La finance est mobilisée et nombreuses sont les initiatives en matière de finance « verte » ou responsable. Mais la dynamique du mouvement ne répond pas encore suffisamment à l’urgence du problème. En changeant les paradigmes du problème et en l’abordant dans une approche holistique sur ses trois dimensions (financières, sociales et technologiques), notre plateforme apporte une réponse opérationnelle à tous les freins identifiés et permet l’avènement de la finance symbiotique.
Charles Duclos (ENSIIE, HEC) chercheur associé chez VENTUREXPERT en charge du programme VERTDEEP – plateforme inclusive pour rémunérer l’Impact Positifs des Objectifs de Développement Durable.